La crise qui enflamme les Antilles en cette fin d’année 2021 appelle deux grandes réponses.
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D’abord, une réponse urgente : rétablir l’ordre public.
Depuis le 20 novembre, la vie publique, économique et sociale s’est arrêtée en Guadeloupe et en Martinique. Sous couvert de « grève générale », les ronds-points sont pris d’assaut, les routes sont barrées, l’accès aux hôpitaux est entravé, les entreprises sont bloquées quand elles ne sont pas saccagées ou brûlées. Les rues sont aux mains des voyous qui y font régner la loi de l’arbitraire.
Quelles que soient les raisons invoquées, quelles que soient les difficultés rencontrées, rien ne doit justifier la remise en cause des principes fondamentaux de notre République. Si parfois nos libertés individuelles peuvent être contraintes par la loi pour sauvegarder notre unité républicaine, jamais elles ne doivent l’être en dehors de la loi. Notre liberté de circuler, de travailler, d’accéder aux soins ou à l’école… ne doit jamais être bradée pour quelque revendication que ce soit, aussi légitimes puissent-elles paraître.
Si le droit de grève est sacré, celui de circuler librement l’est tout autant.
Le rétablissement de l’ordre public incombe à l’État, certes. Mais il incombe aussi aux autorités locales qui ont le devoir d’appeler clairement la population à obéir aux règles républicaines. Les troubles qui effondrent la Guadeloupe et la Martinique obligent tous les porteurs d’autorité – élus, représentants syndicaux, représentants patronaux, autorités universitaires, éducatives, associatives, culturelles… – à faire front uni avec l’État, sans réserve, sans ambiguïté. Ils obligent à la responsabilité et à la solidarité républicaine.
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Mais aussi une réponse structurelle pour revitaliser durablement nos territoires : la Zone Franche Sociale
Si c’est la politique vaccinale qui a déclenché l’incendie, les ferments de la crise sont en réalité bien plus profonds.
Depuis plus de 10 ans, les départements et territoires d’Outre-mer s’enfoncent dans une sinistrose qui touche tous leurs leviers : politiques, économiques, environnementaux, sociétaux… et qui se traduit notamment par un effondrement démographique aux Antilles, et un marasme économique et social marqué par un chômage élevé, devenu endémique.
Chaque année par exemple, la Martinique perd 5.000 habitants ! L’équivalent d’une petite commune qui est rayée de la carte. La Guadeloupe est sur la même tendance. Une telle baisse démographique engendre mécaniquement l’appauvrissement des populations et son cortège de malheurs : le chômage, la désespérance, la violence… et l’utilisation de la situation par des mouvements activistes séparatistes.
Le pouvoir d’achat est pénalisé par « la vie chère », ce qui nourrit une frustration durable des populations Guadeloupéennes et Martiniquaises. L’INSEE et l’IEDOM ont montré en effet que les prix sont globalement plus élevés de : + 11,6 % en Guyane, + 12,3 % en Martinique, + 12,5 % en Guadeloupe, + 6,9 % à Mayotte, + 7,1 % à La Réunion, par rapport à l’Hexagone.
Les problèmes de chômage et de pouvoir d’achat sont endémiques aux Antilles-Guyane. Tous les dispositifs déployés jusqu’à présent n’ont donné que de piètres résultats. Aucun d’entre eux n’a réellement permis à ces territoires de trouver les conditions d’un développement harmonieux et durable. Depuis 30 ans la situation se dégrade, et le lien national se distend.
En résumé, les deux moteurs de l’économie ultra-marine sont en panne :
- Le moteur de l’offre : baisse de la commande publique, affaiblissement des capacités d’investissement des entreprises…
- Le moteur de la demande : atonie de la consommation…
Il faut donc rallumer ces deux moteurs et agir de concert sur l’emploi et sur la consommation des ménages afin de créer un choc de revitalisation économique.
La Zone Franche Sociale s’attaque radicalement au coût du travail tout en boostant le pouvoir d’achat des salariés. Elle est la réponse immédiate au triple défi du chômage, du coût de la vie et de l’attractivité.
La Zone Franche Sociale consiste à exonérer totalement les salaires relevant du secteur privé, sans distinction de revenus, de toutes leurs charges patronales et salariales. Elle combinera naturellement les effets positifs d’une politique de l’offre et d’une politique de la demande.
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Zone Franche Sociale = zéro charge sur les salaires, pour dynamiser l’offre
Le tissu économique local est constitué essentiellement de petites entreprises « de main d’œuvre », dont les capacités d’embauche sont contraintes, aussi bien par les coûts salariaux que par l’atonie des marchés.
En ramenant le coût du travail au simple niveau du salaire net, c’est une nouvelle marge de manœuvre qui est donnée aux entreprises pour leur permettre de développer leurs activités, investir, innover, baisser leurs prix et recruter des collaborateurs. C’est un frein à l’embauche qui est levé. Et c’est un accélérateur qui est offert à toutes celles et ceux qui veulent entreprendre.
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Zone Franche Sociale = zéro charge sur les salaires, pour dynamiser la demande
Le coût de la vie en Outre-mer est supérieur d’environ 12% à celui de la France hexagonale (+35% sur l’alimentaire, principale source de dépenses des foyers ultramarins). Ce qui maintient ces sociétés dans un état constant de tension sociale, voire de risque d’explosion sociétale.
En ramenant les salaires nets au niveau du brut, c’est une nouvelle capacité de consommer qui est offerte aux salariés leur permettant ainsi de contribuer à relancer l’économique locale. Notons que cette nouvelle marge de manœuvre permettra aux citoyens d’adopter plus facilement les comportements vertueux de la transition écologique.
Cette mesure de « Zone Franche Sociale » doit être déployée dans les territoires d’Outre-mer les plus impactés par l’effondrement démographique : la Guadeloupe et la Martinique. Son coût, en apparence élevé, est justifié par l’écart de contribution publique par habitant entre les Antilles et la France Hexagonale (environ 30% d’écart, selon une étude DME de 2010). Il sera compensé par les effets vertueux du dispositif : réduction forte du chômage et relance de la consommation.
En effet, cette mesure aura des conséquences positives sur les comptes publics, en réduisant sensiblement les coûts sociaux liés au chômage, et en générant des revenus fiscaux plus importants : accroissement des revenus de TVA et d’Octroi de Mer par l’augmentation de la consommation, accroissement de la fiscalité des ménages et des entreprises par l’amélioration des comptes d’exploitation, notamment.
La Zone Franche Sociale est la grande mesure qui nous permettra enfin de relever durablement les défis du chômage, du pouvoir d’achat et de l’attractivité des territoires d’Outre-mer, en en priorité de la Martinique et de la Guadeloupe. Elle permettra d’inverser la courbe démographique et d’attirer de nouveaux investisseurs. C’est une mesure efficace et juste car elle règle en même temps les problèmes des employeurs et les difficultés des salariés.
Cette mesure a été proposée par l’ensemble des organisations socio-professionnelles martiniquaises en mars 2019 dans le cadre du « Grand débat national ». Elle a été reprise et développée notamment par Renaissance Martinique.