Le 5 Février 2021, Yvon JOSEPH-HENRI publiait un article intitulé « ECOCRIME : RENDRE JUSTICE ». Il s’agissait de la première partie de son propos. Avec Florent GRABIN, il en signe aujourd’hui la seconde partie :
Un empoisonnement multiple dont nous portons une grande part de responsabilité
Avant tout, il faut comprendre que l’autorisation de l’Etat de prolonger l’utilisation de la chlordécone dans la banane, n’est pas issue d’une de ces volontés saugrenues, mais de la demande de nos parlementaires martiniquais. Ceux-ci ont répondu à une nécessité de préserver l’emploi d’une quasi-monoculture. En même temps, force est de constater que l’effet de ce pesticide atteint la population par le contact avec le produit mais aussi par la boisson et la nourriture.
Plutôt qu’une indemnisation, il nous paraît peut-être plus adapté d’obtenir une prise en charge pour la population. Et, pour les ouvriers agricoles, une prise en charge de leur pathologie à 100% !
En matière de Santé, il est vraisemblable qu’on trouvera très peu de chlordécone aujourd’hui dans les organismes, car nous avons depuis 20 ans, utilisé d’autres produits dont la combinaison, loin d’être anodine, développe également des cancers.
La banane, un secteur porteur, économiquement, socialement et écologiquement
Sur le plan économique, il convient de rappeler que le secteur de la banane est un secteur particulièrement actif. Ce dernier emploie entre 6.000 et 6.500 salariés en emplois directs, soit près de 15.000 salariés indirects !
Ce sont les békés, il faut le rappeler, qui ont fait des ouvriers de la banane des salariés payés 365 jours de l’année, au lieu d’être les saisonniers que l’on peut constater partout ailleurs, chez nos voisins et dans les autres pays producteurs de bananes concurrents. De même, les travailleurs de la banane bénéficient à bon droit d’une couverture en termes de volet social, et de médecine du travail, ce que l’on ne trouve pas chez nos voisins de la Caraïbe ou d’Amérique du sud. Au moment où des activistes ignorants, après s’être attachés à réinventer l’histoire de notre île et de notre peuple, stigmatisent aujourd’hui les acteurs de cette filière, ce sont des éléments qu’il convient de rappeler.
Il convient aussi de rappeler que les attaques que subit chez nous le secteur de la banane, ne manquent pas de porter des coups à un secteur dont les progrès sont exceptionnels en termes de qualité. Vouloir détruire la banane, c’est assurément vouloir porter atteinte à un secteur porteur d’emplois, de qualité, et de prise en charge sociale des personnels. Quant à la production, alors que nous ne disposons pas de financement pour la recherche, ce sont 280.000 tonnes de bananes qui font l’objet de méthodes alternatives et de projets à valider. Ainsi Michel La Rougerie produit des bananes bio, accompagné en cela par Cuba.
Or, le consommateur martiniquais consomme moins de 10 kg de bananes par an et par personne quand, à Cuba, on en est à 370 kg par an et par personne et que nous sommes largement subventionnés par l’Europe qui accompagne Cuba dans ses recherches ! On a tous les moyens qui leur font défaut ! Les travailleurs dominicains et haïtiens qui viennent chez nous ne veulent pas repartir au vu des méthodes et mécanisation de la production et des salaires.
Notre banane écologique progresse à grands pas en qualité et sans pesticides, préfigurant une Martinique « joyau écologique ».
Il est temps pour nous de défendre notre production agricole martiniquaise. Imaginons une seconde que, du fait de la pandémie, nous soyons brutalement isolés du reste du monde : il nous faudra bien nous alimenter avec ce que nous produisons. Cela pourra-t-il suffire ? Sait-on qu’on s’est aperçu qu’en abandonnant les habitudes antérieures, en laissant pousser l’herbe au milieu des champs de bananes, la biodiversité reprend sa place ? Sait-on que celle qu’on appelle la fourmi « gros bonda » se nourrit des œufs des charançons de la banane ? En laissant la nature reprendre ses droits, on élimine les pesticides.
Une étude commandée par l’Union des Planteurs de Bananes de Guadeloupe et de Martinique (UGPBAN) et la Région d’Alfred Marie-Jeanne à des universitaires de l’Université des Antilles-Guyane préconise un retour massif à la biodiversité. Retour des papillons en voie de disparition depuis 50 ans ! Les ouvriers agricoles font état du retour des serpents, des guêpes et des fourmis. On peut produire du miel dans les bananeraies. Le terreau écologique fonctionne favorablement !
Forts de notre agriculture développons une industrie agricole écologique décomplexée !
Il nous faut donc pousser très fort la production agricole ; et la pousser dans la voie de la qualité et d’une production bio, écologique. Pourquoi ne trouverions-nous pas des Ti-nains et de la morue en boîte comme les cassoulets venant de toutes les Régions de France ? Pourquoi n’avons-nous pas une surproduction de fruits à pain étant donné toutes les qualités dont il fait preuve ? Nous agressons nos productions comme celle de la banane au lieu d’encourager nos producteurs à faire mieux encore. Nous préférons consommer des légumes et fruits dont nous ignorons la manière dont ils ont poussé… et ce qu’ils peuvent contenir comme pesticides ! Le monde à l’envers !
Renaissance Martinique s’intéresse à notre économie réelle, et non fantasmée, car sans développement de notre économie, nous resterons des assistés. Qui parmi ceux qui réclament les votes des Martiniquais, posent ainsi le problème de l’agriculture ? On parle d’autosuffisance, or, outre l’absence de méthode pour accéder à cette autosuffisance, nous ne voyons rien venir sur son développement ! Des métiers devraient prendre de l’expansion, liés au développement de l’agriculture bio, de l’agriculture débouchant sur des produits finis, transformés. Ainsi combien d’environnementalistes avons-nous ? 2 ! C’est notoirement insuffisant !
Nous devons avoir un vrai réflexe patriotique en matière de consommation et de production locale, à charge pour celles-ci d’être des pôles de qualité, et de perfection en matière de biologie et d’écologie. Toute une chaîne à développer avec les bonnes volontés et les compétences qui pointent à l’horizon. On peut compter sur la vigilance en matière de qualité de notre association car on ne saurait imaginer tricher et tromper les consommateurs : ce serait au bout du compte se condamner à l’échec.
Yvon JOSEPH-HENRI, Président de l’association des Consommateurs et des Citoyens de la Caraïbe
Florent GRABIN, Président de l’association écologique PUMA (Pour Une Martinique Autrement)